mercredi 19 juin 2013

CALENTURE & CASCADEUSE


Elle a léché le dos d’un crapaud vénéneux.

Depuis un mois Tina n’a pas taillé ses griffes, elle les a laissé pousser. Si elles n’étaient pas si fines, si aiguisées, on se verrait dedans comme dans un revolver.

Il s'agit là, maintenant, de trancher dans la doublure pour se retrouver.

Talon, plante, talon, plante ; cul, hanches avancent, basculent bâbord, tribord - la lune qui influence. Elle mouille comme un pirate dans la tempête. Elle est tellement bonne qu’on en oublie qu’elle est belle.

Quelques mètres encore et Tina entrevoit, à la faveur de la lueur orange et fiévreuse de l’ampoule, la cascadeuse aux toilettes, un short aux chevilles, culotte aux mollets, agiter l’onde.

Chut...

Œil pour œil dent pour dent : "lui réifier, lui bousiller la gueule" qu'elle se dit sensuellement.

La lame dans la gueule, elle se stationne à quatre pattes sur la moquette - cherokee à décolleté - et apparaît totalement dans la lumière de la porte entrouverte. On ne le voit pas mais elle chevauche un dragon.

Pisser les yeux fermés ? Quelle idée ? Comme si rien ne pouvait se passer ?

Elle a le délire dans l’œil. Le regard change. La panthère se comprime, cambre doucement vers la cascadeuse, rentre ses cuisses dans ses hanches, le nombril dans l'arc, les seins à peine aplatis, hisse son cul, le circule comme un indien dit doucement "oui".

Le couteau en avant elle bondit hors de l'image.

Un temps : le cosmos est suspendu dans les chiottes.

Tonnerre de cuivres, la terre tombe sur la tête du ciel.

La première goutte de sang fait déborder son cœur.

Arthur-Louis Cingualte

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