Une
femme rampe sur un chemin de terre. Ses vêtements sont en partie
déchirés et râpés. A moitié nue, le visage recouvert de terre,
elle se tortille sur le sol, comme si elle voulait se débarrasser de
quelque chose. Quelque chose qui la gêne, la retient, l’entrave,
l’empêche. Sa peau. C’est de sa peau dont elle essaie de se
débarrasser. Des lambeaux de sa vie d’avant se sépare d’elle.
Petit
à petit, mine de rien, elle a fait sa mue. C’est ici, sur ce
chemin de terre, à deux pas d’une autoroute que le long processus
amorcé il y a plusieurs années prend fin. Comme un dédoublement,
une renaissance, une petite mort. Morceaux de vie d’hier
aujourd’hui conjugués à l’imparfait Abandon des peaux mortes.
Des déchets sur le sol, vieilles peaux vides de chairs. Vides de
corps. Mais vides d’âme ?
Peut-être
y laisse-t-elle une parcelle de son âme dans cette peau. Pas le
choix de toute façon. Faire peau neuve. Tabula rasa. Voir le soleil
se lever sur une aube nouvelle. Virginité des sens. Quiétude
retrouvée. Contre quelques centimètres carrés de peau. Une peau
nouvelle pour. Sentir le souffle du vent, la fraîcheur de la pluie,
la chaude caresse du soleil. Une peau nouvelle pour. Jouir de la peau
de l’être aimé contre la sienne. Une peau nouvelle pour. Eprouver
le monde autour. Il lui faut une peau nouvelle pour.
(Marianne Desroziers, nouvelle parue dans la revue Cabaret numéro 5, printemps
2013)
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